Dossiers Cyna > File 05-06 : Présentation des oeuvres

Voici les versions longues de nos articles sur les films Asgard et Abel ainsi que la mini-série Asgard.

Film Asgard

Sorti en salles le 12 mars 1988, le second long-métrage de Saint Seiya, intitulé Kamigami no atsuki tatakai (L'ardente bataille des dieux), naît sous la plume de Takao
Koyama, le scénariste principal de la série, et s'inspire volontiers de Natacha, l'histoire courte présentée à la fin du volume 13 du manga.

Hyôga se rend au Royaume d'Asgard, à l'extrême nord de l'Europe, pour enquêter sur les sinistres évènements qui s'y préparent. Alors qu'il disparait mystérieusement, Athéna et sa suite débarquent sur place à leur tour. Ils sont accueillis par le prêtre d'Odin, qui dissimule de bien terribles desseins. Son nom, Derbal, est un anagramme de "Balder" (Baldr, Baldur), le fils d'Odin.

Nous poussons pour la première fois les portes de ce Royaume glacé, où vie quotidienne rime avec souffrance et privations. Des territoires où l'environnement, merveilleux, est paradoxalement hostile. Nous faisons pour la première fois la connaissance des Guerriers Divins, prototypes simplifiés des fiers et nobles combattants de la série. Le scénario, prenant, se paie le luxe d'un retournement de situation raffraîchissant sur Hyôga, mais laisse cependant avant tout la vedette à l'onirisme et aux musiques, dont les notes poignantes sont autant de feuilles d'Yggdrasil, l'arbre immortel symbole d'espoir, dispersées par les vents glacials de cette triste contrée. La réalisation, poétique et efficace, a été confiée au plus essentiel des metteurs en scène de l'univers Saint Seiya, Shigeyasu Yamauchi, dont c'était le premier film. Une réussite.
Film Abel

Réalisé à l'occasion des 20 ans de l'hebdo Jump, il est arrivé en fanfare dans les salles le 23 juillet 1988 exactement. Shinku no shônen densetsu (La légende du jeune homme écarlate) est le seul long-métrage de la série à avoir évité le traditionnel cadre du Tôei Manga Matsuri/Anime Fair (3 ou 4 séries déclinées en films de 30 à 45mn présentés ensemble).

Abel, fils de Zeus et frère d'Athéna, revient sur Terre après s'être sorti de l'oubli dans lequel les dieux l'avaient plongé pour mettre un terme à son ambition dévorante. Assumant le rôle de Dieu du Soleil, Abel affirme son désir d'emmener sa soeur Athéna loin d'une planète qu'il estime corrompue et qu'il songe de plus en plus à détruire définitivement.

Si la structure de ce long-métrage est identique à celle des trois autres films, le réalisateur Shigeyasu Yamauchi a utilisé les 30 minutes supplémentaires qui lui ont été octroyées pour étoffer le côté contemplatif du début du film. Hypnotisés, les spectateurs admirent la douce et lente élaboration narrative, au gré de laquelle on se laisse paisiblement emporter dans l'univers de nos héros. Le premier quart d'heure est propre à une certaine méditation. Saori s'égare dans ses pensées, les papillons batifolent, les fleurs dansent au vent, Seiya, inconsolable, quitte ses amis pour pleurer seul sur les quais...

Produit durant la diffusion des épisodes d'Asgard, le film est souvent considéré comme le summum esthétique de Saint Seiya. Beaucoup ne lui ont cependant pas pardonné ses combats rapides, ses dialogues un peu confus (signés Yoshiyuki Suga, scénariste sur la série) et une utilisation peut-être malvenue des chevaliers d'or. Cependant, "Abel", probablement issu de l'imagination de Kurumada, aura tout de même inspiré le futur Hadès, notamment dans sa structure narrative. Rébellion feinte des Chevaliers d'Or ressuscités, suicide de Saga emmenant Jaô dans les cieux (scène rappelant celle de Kanon et Rhadamanthe dans le manga), la mort-sacrifice de Saori... Et nos héros, qui font face pour la première fois à un véritable dieu charismatique.

Dans ce projet d'envergure, tout est plus grand, plus fort et plus beau. Poésie contemplative, esthétisme léché et émotion pure sont au rendez-vous. Malgré cela, Abel étant sorti pendant les laborieux épisodes TV d'Albérich où l'audimat prit un coup sévère, il a probablement eu du mal à trouver son public. Mais de l'autre côté du globe, les Mexicains ont eux aussi donné sa chance au film en salles, et grand bien leur en a fait... il est resté pas moins de cinq mois à l'affiche !
Série Asgard

La fin du Sanctuaire approchant, la Tôei mise sur le succès du film d'Asgard pour créer le chapitre Ôgon no yûbiwa (L'anneau d'or), 26 épisodes basés sur son univers, avec des personnages similaires et la belle et charismatique Hilda en lieu et place de Derbal.

A cette occasion, Kôzô Morishita passe les rênes de la série au non moins doué Kazuhito Kikuchi. Changement de style et d'ambiance, donc, accentué par la montée en grade du co-scénariste Yoshiyuki Suga, et le soin particulier apporté aux décors, symboles de ces tristes terres d'Asgard où les sentiments sont enfouis sous la neige. Ils sont réalisés en grande partie par Yoshiyuki Shikano et Minoru Ôkauchi, les deux assistants principaux de Tadao Kubota, très occupé par la direction artistique d'Abel.

Possédée par Poséidon, Hilda abandonne sa mission tantalesque : utiliser son Cosmos pour empêcher un cataclysme naturel mondiale... Athéna doit prendre sa place. Ses Chevaliers vont tenter de faire reprendre ses esprits à Hilda, mais sur leur chemin se dressent ses fidèles Guerriers Divins. Contrairement au film, ils ont tous un passé douloureux, à l'image du destin impitoyable de leur pays. Asgard, le royaume où les âmes chaleureuses survivent difficilement parmi les esprits glacés qui les entourent, est condamné à souffrir pour préserver le bien-être du reste du monde. A quoi bon vivre sans bonheur ? Les Guerriers, subjugués par la bonté de leur prêtresse, pensent sincèrement qu'elle a décidé que son peuple méritait le bonheur. Malheureusement, leur martyr est inéluctable et ils ont accepté leur mort depuis longtemps. Asgard, c'est la douleur de devoir tuer son double, celui dont vous avez été le confident l'espace d'un instant. Un voyage à travers la psyché d'hommes qui s'oublient dans leur devoir et leur amour pour une femme inaccessible et pourtant si proche d'eux et si prompte à offrir un peu de chaleur autrefois. C'est la tragédie de la dépendance d'Hilda, de la confiance aveugle envers elle. Il n'y a rien de plus terrible que de mourir par excès d'amour. Les Japonais vivront mal cette réalité et bouderont vite ce chef-d'oeuvre qui, étant le chapitre le plus cérébral de la série, nécessite souvent un deuxième visionnage pour en saisir toute la profondeur.


Ces articles ont été écrits à quatre mains et publiés dans des versions réduites dans les livrets des Eternal Edition de Loga-Rythme (coffret n°3).


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